Écrit par un humain à quelques amis
Le débat est ancien -- mais la morgue avec laquelle on juge ces robots
"qui ne comprennent rien", "qui n'ont pas de culture, ni de passé" doit
être (solidement) bémolisée.
ChatGPT (et ce type de robot en général) comprennent... comme nous
comprenons ! Il est pratiquement impossible de tracer une frontière
entre ce qu'est la "compréhension" pour un humain et la "compréhension"
pour un dispositif artificiel ! L'expérience de la "chambre chinoise"
de Searle est très célèbre – et posait déjà la base de toutes les
discussions à ce sujet :
Voici l'argument (principal) que développe Sabine Hossenfelder dans
sa dernière vidéo (lien tout en bas) :
—> on mesure la compréhension par X d'un problème Y aux _effets
pratiques_ que X est capable de tirer du probème Y.
Ainsi pour la physique quantique : qui peut dire qu'il comprend cette
théorie ? Eh bien c'est simple : celui qui comprend la physique quantique
est celui qui conçoit/fabrique/utilise/vend des lasers, des GPS, des
mémoires informatiques de masse, des réseaux 5 ou 6G, des horloges
atomiques, des fibres optiques, des aimants géants que l'on refroidit
à Cadarache près du zéro absolu (expérience ITER), etc.
Celui-là comprend la physique quantique et ses équations.
Si ChatGPT remplit de manière satisfaisante (donc fiable et viable
commercialement) les besoins des humains A, B ou C (et bientôt peut-être
les besoins de méta-robots D, E ou F), alors ChatGPT _comprend_ les besoins
de ces humains (comme un scanner à IRM comprend, encore une fois, la
physique quantique).
Vous allez me dire qu'on ne peut pas prétendre qu'une brosse à dent
ou un frigo "comprennent" les missions qu'ils remplissent — mais en
fait, oui ! Et même très bien... vu leur succès !
(Mais... une brosse à dent pose-t-elle des choix ? Un frigo ? Sans nous
consulter ? À sa guise ? En pesant le pour et le contre ? Avec une
couche d'éthique ? Oui ! comme l'atteste un thermostat depuis la nuit
des temps et des premiers bilames ! Comme l'atteste aussi une Tesla
soumise au choix d'écraser un groupe d'écoliers ou de vieillards).
Cette approche pragmatique solide permet d'évacuer toute la "chaleur"
romantique qui entoure (encore, trop) le cerveau humain et ses (pseudo-)
performances "inaccessibles" à la matière inerte (laquelle le constitue
intimement pourtant !-)
Vous parlerez alors de "créativité". Les humains seraient "créatifs" dans
un sens indépassable par des machines ou de purs dispositifs techniques.
La réponse des réductionnistes (et des ultras que sont les physicalistes
– lesquels le taulier vénère grave !-) est un petit sourire.
Si tout n'est qu'enchaînement de causes et d'effets, la créativité humaine
"pure" a peu d’arguments, non ? Attendez quelques mois et vous verrez ce
que diront/écriront les agents conversationnels comme ChatGPT. Et ce que
peindront/sculpteront/dessineront les logiciels "à la Dall-e".
Combien de musiques dans l'espace sonore que nous parcourons sont écrites
par des logiciels ? 80% ? Elles nous plaisent ? Elles ne dérangent pas la
majorité des oreilles qui les entendent, en tout cas.
Les logiciels de "musique automatique" comprennent donc les humains – et
sont tous diplômés en contrepoint.
La météo de demain n’existe pas encore — elle est pourtant calculée en
permanence et sera fournie impeccablement. Vous vous rendez compte :
calculer le futur ! (serait-il écrit ? atchoum !-)
Oui, mais... la littérature, la fiction, la poésie ?
Je signale à nos lecteurs le cas de Sarah Rivens, laquelle place cette
semaine dans le top 10 des ventes de livres de fiction (voir l'Express
et l'Obs) _trois_ opus (de sa série "Captive") :
Est-ce de la littérature ? Y a-t-il un sens "noble" à ce mot ? Sarah
Rivens existe-t-elle ? Est-elle une nouvelle "Her" façon Spike Jonze
– laquelle cracherait des pixels d'encre sur des mètres cube de papier
depuis Alger ?
Les mots "Intelligence artificielle" ont ceci de fascinant qu'ils seront
bientôt compris "à l'os" par les humains : _toutes_ les intelligences
sont artificielles – humaines, animales, végétales, minérales, logicielles,
électriques, magnétiques, quantiques. Tout est construit à partir de
blocs-unité, de poulies, de leviers, de statistiques et de lois physiques
qui s’auto-engendrent.
Bon, j'arrête, je crois que j'en fais dire bcp trop à mon Allemande
préférée (n'ayez pas peur, c'est en anglais sous-titré français – et
son émission ne dure que 20 minutes, donc... pas assez !-)
à+
É.
Catapulté de mon aPhone intelligent
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