Jouer avec DALL-E

Après avoir « discuté » avec ChatGPT en ligne sur tout et rien, le taulier joua avec DALL-E hier jusquà pas dheure – et samusa comme un fou ! Vive lIA ! (conversationnelle ou illustratrice – malgré les bémols de Libé).
[Cela avait commencé en effet par la lecture, la veille, dun article de Libé (reproduit tout en bas) puis par celle du Chevillard autofictif du jour (ci-dessous) – Chevillard auquel je voulus alors envoyer quelques créations de DALL-E... pour répondre à son « dautres idées ? » en fin de billet] – ce sont les « cubismes » qui commencent cette galerie.
[Jai ajouté quelques photos de notre voyage à Vienne (mi-décembre 2022), vous les distinguerez sans peine – ce sont celles avec des reflets !-]

Fin des cubismes pour Éric Chevillard et début de l
exploration personnelle de DALL-E par le taulier








Le taulier nest pas sûr quil y ait concurrence entre peinture et DALL-E, illustration et DALL-E, photographie et DALL-E...
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Analyse

Illustrateurs et photographes concurrencés par l’intelligence artificielle : «Il n’y a aucune éthique»

Précarisation du métier, utilisation des œuvres sans autorisation ni dédommagement… Illustrateurs et photographes s’alarment de l’explosion de programmes d’intelligence artificielle.

(Aseyn/Libération)

par Clémentine Mercier

publié le 29 décembre 2022 à 18h35

Ils en tirent beaucoup de fierté et… une petite pointe de culpabilité : Data démocratie de Lionel Dos Santos de Sousa, Florian Freyssenet et Thomas Jamet (éd. Diateino) serait le premier livre français avec, en couverture, un visuel exécuté par Dall-E 2, le générateur d’images par intelligence artificielle (IA) qui fait fureur depuis cet été. Il a suffi aux auteurs d’écrire quelques mots dans ce programme – en l’occurrence une «foule de personnes marchant sur un smartphone géant» – pour voir apparaître, au bout de quelques essais, une image reflétant parfaitement leur propos. Grâce à un entraînement («deep learning») sur des centaines de millions d’images, le programme Dall-E 2 crée de nouveaux visuels à partir de mots tapés dans un navigateur – c’est ce que l’on appelle un programme «text-to-image».

«Notre livre parle de la nécessité de l’alignement des intérêts entre Etat, technologies et citoyens. Quelque chose était en train de se passer avec l’arrivée des images de Dall-E 2, nous avons saisi l’opportunité, explique Lionel Dos Santos de Souza. Le visuel produit par l’IA a été mis en concurrence avec celui d’un illustrateur, il a même été question de faire deux couvertures, l’une faite par un illustrateur et l’autre avec l’IA, puis nous avons opté pour l’image faite par la machine parce qu’elle était la meilleure. L’IA permet de raccourcir les circuits de production. On est un peu devenu le mal que l’on dénonce dans ce livre…» Ainsi, l’humanité n’en est pas à un paradoxe près. Et Data démocratie n’est pas un cas isolé. Les éditions Michel Lafon ont aussi utilisé Midjourney – une autre IA qui convertit du texte en images. «Je pense que beaucoup d’éditeurs français et internationaux ont déjà eu recours à l’IA. La différence est que nous l’affichons sur la couverture», a déclaré sa directrice, Elsa Lafon, à Livres Hebdo.

Cet été un petit concours d’art – la Colorado State Fair – a récompensé une image crée par IA. Parallèlement, la presse s’est aussi mise à publier de tels visuels. En juin, le magazine The Economist paraît avec une couverture réalisée grâce à Midjourney. Cosmopolitan suit avec l’image d’une femme cosmonaute créé avec Dall-E 2 et, en début décembre, Libération publie à sa une consacrée à l’IA ChatGPT, redoutable interlocuteur virtuel, une illustration générée avec ce même outil. Fin octobre, des algorithmes ont illustré 95 % d’un numéro spécial du magazine suisse le Temps. Missionné pour écrire les phrases qui leur servent d’instructions (ou prompts ou scripts), le photographe Mathieu Bernard-Reymond fait la démonstration que ces «boîtes à images» révolutionnaires exécutent docilement, rapidement et avec brio tout un type de visuels, du dessin, du simili «reportage» sportif à la nature morte en passant par l’image conceptuelle.

«Mes étudiants me demandent : on sert à quoi ?»

Un séisme dans la création ! Entraînés sur des images d’auteurs connus (des photographies, peintures, dessins captés sur Internet…) ces programmes imitent à la perfection le style de Van Gogh, de Salvador Dalí – qui a inspiré le nom de Dall-E, rencontre du patronyme du peintre et du petit robot de Pixar, Wall-E – mais aussi d’illustrateurs contemporains, Mike Mignola, Greg Rutkowski, Craig Mullins ou même, dans un style photoréaliste, la patte de photographes célèbres comme Annie Leibovitz… Les données deviennent donc des formes : ludique, spectaculaire et addictif ! Il aura suffi d’un seul homme – Mathieu Bernard-Reymond – et de quatre robots (Dall-E 2, Midjourney, Stable Diffusion – en open source – et Disco Diffusion, plus expérimental) pour illustrer un magazine complet : «Tout s’est accéléré cet été, convient le photographe. Ces programmes sont disruptifs. Ils vont nécessairement avoir un impact sur la communication visuelle, la photographie, l’illustration, le design, le stylisme… Toute nouvelle technique crée des conflits. Mes étudiants me demandent : «On sert à quoi ?»»

Alors, les IA tueront-elles les créateurs d’images ? Illustrateurs, photographes, directeurs artistiques, stylistes, retoucheurs et concept artists (créateurs d’univers visuels pour jeux vidéo et dessins animés) seront-ils remplacés par ces boîtes magiques ? S’il est un domaine qui se pensait hors d’atteinte de l’automatisation, c’est bien la création visuelle. Or le bond spectaculaire de ces programmes grâce à l’intelligence artificielle montre qu’aucun secteur de l’économie n’est à l’abri. Les peintres portraitistes n’ont-ils pas été obligés de se reconvertir à l’arrivée de la photographie au XIXe siècle ? Sur Facebook, Instagram et sur les sites de portfolios professionnels, déferle un raz-de-marée d’images générées par IA. Ce qui inquiète naturellement tout un milieu, coincé entre excitation et sidération… Le 28 novembre, une rencontre a réuni à ce sujet auteurs, illustrateurs, chercheur en IA et juristes à l’ADAGP (première société d’auteurs dans les arts visuels) sous le titre «BD, illustration, IA-t-il raison d’avoir peur ?» Il y a effectivement de quoi : car il devient de plus en plus difficile de faire la différence entre une image faite par une machine et celle d’un humain… Même les professionnels s’y trompent.

«On est à la recherche d’une éthique professionnelle»

Parmi les intervenants à l’ADAGP, la directrice de la Ligue des auteurs professionnels, Stéphanie Le Cam tire la sonnette d’alarme. «Tout le monde peut s’improviser illustrateur grâce aux IA. Toute une frange de l’industrie visuelle, dans la presse professionnelle, la communication événementielle, l’édition, est concernée par l’arrivée de ces programmes, précise-t-elle, jointe par téléphone. Tenez, pour un colloque au Sénat sur «Propriété intellectuelle et pop culture», nous avons utilisé exprès une image générée par IA. Il y aura nécessairement une perte de boulot pour les artistes graphiques qui font de l’institutionnel pour survivre. Cela touchera surtout des petites structures dont les premières mesures d’économie portent sur la communication.» La juriste rappelle la fragilité du statut d’auteur, les difficultés pour se faire payer ou cotiser à la retraite, déjà pointées par le rapport Racine«Les IA vont aussi jouer un rôle sur les prix, avec un effet de levier négatif pour négocier les tarifs à la baisse de la part des commanditaires. Les auteurs vont avoir de plus en plus de mal à justifier leurs devis, poursuit-elle. On est à la recherche d’une éthique professionnelle.» Dans le chaos provoqué par les robots, les artistes, dispersés, sont ainsi au cœur d’un champ de bataille… Et leurs créations, mine d’or, sont un véritable enjeu dans la concurrence acharnée que se livrent les sociétés d’IA (OpenAI, Stability.ai…) pour capter leurs œuvres et percer sur le marché grand public. Dall-E 2 dépasserait 1,5 million d’utilisateurs.

Dans les faits, l’utilisation actuelle d’images générées par IA concerne surtout la réalisation de moodboards (assemblage de visuels pour un projet), des essais de story-boards par des non-professionnels, des maquettes ou des choix de textures dans des images composites. «Dall-E nous a sorti des images magnifiques qui illustrent le dossier de notre projet de série, rapporte Malou Briand, scénariste qui s’est abonnée à la version payante d’un programme. L’IA a habillé notre héroïne d’une robe pailletée. Cela nous a donné plein d’idées et cela pose un univers. Elle crée des images qui n’existent pas alors que jusqu’ici les moodboards étaient constitués de photos ou captures d’écrans de films trouvés sur Internet.» Un manque à gagner pour les illustrateurs et photographes ? «Ces programmes sont en fait beaucoup utilisés par des gens qui ne dessinent pas. Et tant que les gens ont des goûts de chiottes, on ne craint rien…» plaisante l’illustrateur Aseyn qui travaille régulièrement pour Libération. L’auteur de bande dessinée reconnaît cependant que ces nouveaux programmes créent un «choc» et mettent en danger les auteurs. «Si mes clients préfèrent économiser 500 euros et générer une image avec un prompt, je ferai un autre métier. Je veux être illustrateur depuis l’âge de 8 ans, le dessin, pour moi, est de l’ordre de l’intime, de l’accomplissement de soi. Les IA font la synthèse d’images puisées dans des sites comme ArtStation ou DeviantArt. Elles ne créent rien de nouveau.» Les utilisateurs critiquent aussi leurs biais, leurs stéréotypes et leurs imperfections (notamment une difficulté à dessiner les doigts).

«C’est la logique d’optimisation poussée à bout»

Mais voilà la principale critique adressée aux IA : elles utilisent – et ont utilisé – sans autorisation des images d’artistes trouvées sur Internet pour entraîner leurs programmes, comme si elles étaient invitées à un gigantesque open bar où les législations en matière de droits d’auteur n’auraient pas droit de cité. Notamment via la plus grande base de données au monde, LAION-5B, une grande boîte opaque qui compte 5,85 milliards d’images (avec des visuels qui seraient issus entre autres d’ArtStation, DeviantArt, Getty Images, Shutterstock, Google Images, Pinterest, Flickr, Twitter, bien que les plateformes se défendent de fournir les images d’artistes aux IA…) En septembre, les Berlinois Holly Herndon et Mat Dryhurst ont créé Spawning, une organisation d’artistes et de développeurs qui militent en faveur de l’accord des créateurs pour tout modèle d’intelligence artificielle. Ensemble, ils ont créé l’outil «Have I been trained» qui permet aux artistes de savoir si leurs œuvres sont dans LAION 5-B. Grâce à cet outil, chacun peut choisir d’apparaître ou non dans les bases de données.

Mais comment être sûr que c’est fiable, alors que les images se démultiplient sur le Web ? Paul Chadeisson, concept artist indépendant, auteur d’impressionnants vaisseaux futuristes, y a retrouvé ses créations. Or l’opt-out – avoir le choix de retirer ses œuvres – est extrêmement compliqué : «Je suis tombé sur mes images en de multiples exemplaires. Mes créations ont clairement servi à l’entraînement de ces machines. Je pourrais faire une liste pour les faire enlever mais bon, il y en a partout. La technologie des IA a besoin d’images pour produire des images. Ce sont des champions de la copie qui cachent leurs sources. Il n’y a aucune éthique. Les créateurs de ces logiciels ont mis au point une sorte de bac à sable dans lequel tout le monde joue actuellement et c’est à nous de nous débrouiller avec !» Le Polonais Greg Rutkowski, virtuose des dessins de fantasy, et dont le nom est massivement utilisé dans les prompts, a déclaré au magazine Forbes qu’on trouve actuellement sur Internet plus d’images générées par IA copiant son style que ses propres œuvres. Directeur artistique dans l’animation et le jeu vidéo, Florent Auguy confirme «le climat bizarre» que crée la démocratisation de ces logiciels. «La promesse de pouvoir se passer d’artistes est une aubaine, c’est la logique d’optimisation poussée à bout. Personnellement, j’ai fait plein de tests et je n’arrive pas à m’approprier des images générées par IA qui se nourrissent du talent des autres. En tapant un texte, toute notion de plaisir du dessin a disparu.»

Excédée, la communauté des illustrateurs s’interroge : comment ces grands shakers d’images, à l’origine des projets de recherche, ont pu devenir des entreprises commerciales ? Comment peuvent-elles avoir le droit de monétiser des sous-produits au grand public après avoir pillé le talent des auteurs ? Et l’ambiance vire à la paranoïa : «Dire qu’il faudrait payer un outil qui s’enrichit avec nos propres créations ! s’emporte l’illustratrice Claire Wendling. Si on est juste bons à remplir des machines, rien ne va plus. Avant, copier sur son voisin était proscrit, et je n’aime pas la petite rhétorique qui dit que la machine s’inspire, tout comme le ferait un humain. Ces logiciels absorbent directement les images des auteurs et les mixent. Ce que je constate, c’est que plus personne ne poste ses images. Tout le monde a peur qu’elles soient reprises. Or, partager nos actualités sur les réseaux nous permet d’exister…» Alors, comment se mobiliser contre ce siphonnage ?

Combat de David contre Goliath

Depuis mi-décembre, les illustrateurs, normalement peu syndiqués et dispersés, affichent sur Facebook, Instagram et ArtStation, un logo (NoAI), des hashtags #SupportHumanArtists, #CreateDontScrape) et un slogan («L’IA art est un vol, aucun contenu sans consentement»). Ils demandent à ArtStation de bannir les images générées par IA et de prendre des mesures pour mettre fin au pillage des portfolios (l’entreprise a répondu qu’elle continuerait à autoriser la publication de dessins générés par IA et qu’elle mettrait au point une norme permettant aux artistes d’accepter ou de refuser que leurs œuvres soient utilisées comme données d’entraînement). En novembre, DeviantArt, énorme plateforme et communauté d’artistes visuels, s’est engagée dans ce sens. Ainsi, la voracité des programmes pousse agences, professionnels, artistes à se positionner.

Fin septembre, Getty, la plus grande banque d’images américaine, a signifié à ses contributeurs (illustrateurs, photographes) ne plus accepter les images conçues avec IA. En revanche, l’agence concurrente, Shutterstock, a opté pour une stratégie inverse en annonçant un partenariat avec OpenAI – qui verra Dall-E 2 directement intégrée à son outil dans les mois à venir selon le média The Verge. Se voulant transparent, Shutterstock lance même un «fonds» pour dédommager les créateurs lorsque la société vendra leurs travaux pour entraîner des IA…

Le 14 décembre, aux Etats-Unis, une cagnotte a été lancée par la Concept Art Association, organisation de défense des artistes du divertissement, pour faire valoir leurs droits à Washington. Cette lutte qui oppose artistes et entreprises de la tech pour la protection des données – qui a tout l’air d’un combat de David contre Goliath – prend ces dernières semaines des allures de course contre la montre. La société d’IA Stability.ai a annoncé le lancement de Stable Diffusion version 3. Et a lancé un ultimatum aux créateurs : ils n’auraient que plus que quelques semaines pour retirer leurs œuvres de LAION 5-B. Les illustrateurs prennent conscience que le génie est sorti de la boîte. Et ce génie a un pistolet posé sur leur tempe.

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