Porter (Liliana), fariboles IA et varia

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23 octobre 2018 -- 21:30

Journée ultra-galère aujourd'hui, tempérée par des courriers ultra-sympas d'amis chers (on y revient plus bas) – et la découverte, grâce à Lunettes rouges, d'une artiste argentine inconnue de la maison : Liliana Porter.
 

40 an séparent ces deux photographies de l'artiste-aux-lignes – et c'est le titre de l'une de ses séries, justement (Forty Years). Voici d'autres images où la ligne joue avec le doigt, le cadre, les murs de la galerie – toujours 40 ans après les originaux de 1973 :



Ce travail-ci, de 2006, est-il pas un poil (!) autoréférent ?

Et ici, en fin de page, une petite animation sympa
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23 octobre 2018 -- 21:45

Un article horrifique (et non prémonitoire, I hope) du Libé du jour, sur la vie spectrale à venir :


Intelligence artificielle : «De plus en plus de spectres vont administrer nos vies»

Par Christophe Alix et Jean-Christophe Féraud — 22 octobre 2018 à 18:56

Le philosophe critique Eric Sadin, qui publie «l’Intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle», analyse l’emprise de l’IA sur la société. Pour lui, nous vivons un tournant, qui voit des systèmes nous enjoindre d’agir en toutes circonstances en vue d’optimiser nos actes.

Écrivain et philosophe critique, Eric Sadin analyse l’emprise du numérique sur nos sociétés. Après la Vie algorithmique et la Silicolonisation du monde,il publie l’Intelligence artificielle ou l’enjeu du siècle (1). Une entreprise de déconstruction systématique des discours technologiques, politiques et économiques présentant l’intelligence artificielle (IA) comme «la» nouvelle frontière.

> Emmanuel Macron a lancé un plan «intelligence artificielle» à 1,5 milliard d’euros pour faire de la France un leader du secteur. L’IA est-elle devenue l’ultime marqueur de la modernité ?
C’est la grande obsession de l’époque. Entreprises, politiques et chercheurs ne jurent que par l’IA car elle laisse entrevoir l’émergence d’un monde partout sécurisé, optimisé et fluidifié… Et des perspectives économiques illimitées. Les grandes puissances, Etats-Unis et Chine, mobilisent d’énormes moyens en vue d’être aux avant-postes. Et voilà qu’après la «start-up nation», Emmanuel Macron veut faire de la France un «hub mondial de l’IA» et «attirer les meilleurs chercheurs étrangers». Comme il est entendu qu’«il ne faut pas rater le train de l’histoire», les investissements s’opèrent dans la plus grande précipitation. A telle enseigne que Mounir Mahjoubi, le secrétaire d’Etat au Numérique, dit comprendre que «certains préfèrent avancer sur les technologies d’abord et réfléchir ensuite» ! Vu la portée des enjeux, il est au contraire impératif que ces questions fassent l’objet d’un vrai débat public, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.

> Votre livre pointe l’IA comme un «antihumanisme radical». Pourtant, ces technologies cherchent à imiter notre cerveau et sont censées nous aider…
Cette ambition de concevoir des systèmes modélisés sur le cerveau humain guide les recherches menées dans les laboratoires. IBM, par exemple, dit avoir mis au point des puces synaptiques, et Intel a élaboré une puce dite neuromorphique. Mais il s’agit là d’un vocabulaire impropre : nous n’avons, en aucune manière, affaire à une réplique de notre intelligence, même partielle. Le terme «intelligence artificielle» est un abus de langage laissant croire qu’elle serait naturellement habilitée à se substituer à la nôtre en vue d’assurer une meilleure conduite de nos vies. Il faut remettre en cause cette appellation anthropomorphe. En vérité, ce qui est nommé «IA» représente un mode de rationalité technologique cherchant à optimiser toute situation, à satisfaire nombre d’intérêts privés et, au bout du compte, à faire prévaloir un utilitarisme généralisé.

> Vous parlez d’une toute-puissance en devenir capable d’énoncer «la vérité» à notre place…
Ce qui caractérise l’IA, c’est que c’est une puissance d’expertise qui ne cesse de se perfectionner. Ses systèmes auto-apprenants sont capables d’analyser des situations toujours plus variées et de nous révéler des états de fait dont nous n’avions aucune conscience dans certains cas. Ils le font à des vitesses qui dépassent nos capacités cognitives. Nous vivons un changement de statut des technologies numériques : elles ne sont plus seulement destinées à nous permettre d’accéder à l’information mais à nous divulguer la réalité des phénomènes au-delà des apparences. Au fond, ces systèmes computationnels sont dotés d’une singulière et troublante vocation : énoncer la vérité. La technique se voit recevoir des prérogatives inédites : éclairer de ses lumières le cours de notre existence. C’est là le fait majeur.

> Comment ce technè logos, que vous définissez comme une technologie à même de proférer du verbe, se manifeste-t-il dans notre quotidien ?
Au moment où ces machines sont appelées à nous dire la vérité, elles se trouvent douées de parole, à l’image de ces enceintes connectées avec lesquelles nous pouvons dialoguer. Cette disposition est également à l’œuvre dans les chatbots, les agents conversationnels, ou dans les assistants numériques personnels conçus pour nous guider dans notre quotidien. Nous allons de plus en plus être entourés de spectres chargés d’administrer nos vies. C’est ce que je nomme le «pouvoir-kairos», autrement dit la volonté de l’industrie du numérique d’être continuellement à nos côtés afin de chercher, dès que l’occasion s’en présente, d’infléchir nos gestes en énonçant ce qui est supposé nous convenir. La bataille économique à venir entre Google, Facebook, Amazon, Baidu [le Google chinois, ndlr] et autres va donner lieu à une compétition acharnée pour la conquête de cette présence spectrale, chaque acteur s’évertuant à imposer son emprise aux dépens de tous les autres.

> À vous lire, c’est un «dessaisissement» de notre droit à décider de nos vies qui nous menace…
Nous vivons un tournant injonctif de la technique. Il s’agit là d’un phénomène unique dans l’histoire de l’humanité qui voit des systèmes nous enjoindre d’agir de telle ou telle manière. Cela peut aller d’un niveau modéré et incitatif, à l’œuvre dans une application de coaching sportif par exemple, à un niveau prescriptif, dans le cas de l’examen de l’octroi d’un emprunt bancaire. Même le secteur du recrutement commence à avoir recours à des robots conversationnels pour sélectionner les candidats ! On nous sert la fable d’une complémentarité homme-machine mais en réalité, plus le niveau de l’expertise automatisée se perfectionnera, plus l’évaluation humaine sera marginalisée. Et on atteint déjà des niveaux d’injonction coercitifs dans le champ du travail, avec des systèmes dictant à des personnes les gestes à exécuter. Le libre exercice de notre faculté de jugement se trouve substitué par des protocoles destinés à orienter nos actes. Il s’agit là d’une rupture politique, juridique et anthropologique sans précédent.

> Le danger, c’est que ces machines «aidantes» prennent toujours plus de décisions à notre place. Mais sans elles, pourrions-nous suivre l’accélération numérique ?
Sous couvert de facilitation croissante de nos tâches, nous n’avons pas vu le renversement qui s’est produit. Ces technologies d’aide à la décision sont devenues des instances décisionnelles. D’une certaine manière, nous serons moins appelés à donner des instructions aux machines qu’à en recevoir d’elles. Cette logique est déjà à l’œuvre dans la médecine, dont on ne cesse de louer les avantages qu’elle va tirer de l’intelligence artificielle. On se réjouit du diagnostic automatisé qui offrirait un saut qualitatif, mais on n’évoque jamais le fait que ces mêmes systèmes sont déjà dotés de la faculté de prescription entraînant l’achat de mots-clés par les groupes pharmaceutiques. En nous truffant de capteurs, ces puissances financières promettent d’interpréter en permanence nos flux physiologiques dans le but de nous recommander produits de bien-être et traitements thérapeutiques. Mais cette promesse de grandes avancées médicales cache le véritable objectif de l’industrie du numérique qui entend faire main basse sur la santé ! Il est temps de s’inscrire en faux contre les propos d’un Yann LeCun, par exemple. Ce spécialiste français du maching learning, qui est devenu le «Chief AI Scientist» de Facebook, répète partout que ces avancées légitiment l’intelligence artificielle. Pourquoi ne parle-t-il pas plutôt des techniques d’interprétation des comportements qu’il conçoit pour cette firme ? Si elles étaient rendues publiques, ces recherches permettraient de mieux comprendre ce qui est en train de se jouer.

> L’IA est-elle une menace qui pourrait nous «détruire» un jour, comme l’affirme Elon Musk ?
Ces propos sensationnalistes témoignent d’une certaine schizophrénie. Ingénieurs et chercheurs se sont laissé prendre dans un piège fatal. La technique, en tant que champ relativement autonome, a aujourd’hui disparu. Seul demeure le techno-économique. Pour se donner bonne conscience, Musk et toute la sphère des ingénieurs enrôlés par l’industrie numérique répètent en boucle que «la machine doit être au service de l’homme». Ils invoquent continuellement l’éthique. C’est l’une des grandes impostures de notre temps. Ces discours de façade permettent de faire bonne figure à peu de frais, mais ce sont ces mêmes personnes qui s’emploient à accroître l’expertise de ces systèmes au mépris des conséquences.

> Vous expliquez que cette «main invisible automatisée» va aussi«organiser la fin du politique», et donc de la démocratie…
Nous assistons à la concrétisation du rêve des saint-simoniens aspirant à une saine administration des choses. Les responsables politiques entendent profiter de l’IA pour instaurer une gouvernance automatisée de nombreux secteurs de la société : les relations entre citoyens et l’administration, les transports, l’éducation, la justice… Cette logique offre l’avantage de nécessiter moins d’agents humains et de diminuer les coûts. D’où l’importance de l’open data pour les gouvernements sociolibéraux qui comptent, grâce à la mise à disposition des données publiques, laisser au régime privé le soin d’organiser le cours des affaires collectives, entraînant une marchandisation de la vie publique. La «smart city» est emblématique de cette idéologie qui verrait les systèmes réguler au mieux notre quotidien : on laisse agir les systèmes au sein d’un monde parfait parce que sans signataire et régi par des signaux. En cela, nous assistons à la liquidation en cours du politique, entendu comme l’engagement de choix incertains après conflit et délibération.

> Comment expliquer la faible résonance du discours critique sur l’intelligence artificielle dans le débat public ?
Je pense que nous vivons une faillite de la conscience. Lorsque nous voulons faire preuve de vigilance, nous en venons toujours à la question des données personnelles, qui certes représente un enjeu d’importance, mais qui reste limitée au primat de la seule protection de la vie privée. Jamais nous ne nous soucions de la préservation de notre liberté dans le cadre de la vie en commun et des nouvelles structures asymétriques de pouvoir qu’entraîne l’usage de l’IA, dans le management, par exemple. Depuis quelque temps, la question des «biais» occupe une place centrale. Là encore, il s’agit de points d’importance vu qu’ils peuvent entraîner de possibles discriminations. Mais quand bien même nous nous en débarrasserions, cela n’empêchera pas ce large mouvement d’énonciation automatisée de la vérité à des fins marchandes et utilitaristes de s’instituer. Mais quid du libre exercice de notre faculté de jugement, du déni de notre sensibilité et de notre faillibilité, du respect de la pluralité humaine ? Ce sont là des questions d’ordre civilisationnel auxquelles nous devrions nous confronter sans attendre.

> Alors que faire pour enrayer la marche de ce «Léviathan algorithmique» ?
Nous sommes démunis par la vitesse des développements qui nous empêchent de nous prononcer en conscience et qui sont présentés comme inéluctables. Les évangélistes de l’automatisation du monde que sont Emmanuel Macron et Cédric Villani avec leur plan IA ne jurent que par le dogme de la croissance, au mépris de toutes les conséquences civilisationnelles. Les citoyens doivent sortir de l’apathie. Il faut contredire les techno-discours et faire remonter des témoignages émanant de la réalité du terrain, là où ces systèmes opèrent, sur les lieux de travail, dans les écoles, les hôpitaux… Il faut manifester notre refus à l’égard de certains dispositifs lorsqu’ils bafouent notre intégrité et notre dignité. Contre cet assaut antihumaniste, faisons prévaloir une équation simple mais intangible : plus on compte nous dessaisir de notre pouvoir d’agir, plus il convient d’être agissant.
(1) L’Echappée, 304 pp., 18 €.
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23 octobre 2018 -- 21:50


Illustrons la force de ces IA :

(Les images ci-dessous sont tirées de la vidéo visible ici):

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23 octobre 2018 -- 22:15

Sourire (noir) mien, en tombant sur ces lignes à propos de l'élection présidentielle à venir au Brésil (Bolsonaro) :
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23 octobre 2018 -- 22:15

Les amis du jour sont Éric L. et Jacques-Georges T.-B. :

D'abord Éric (faisant rougir Éric)  :

> C'est toujours un plaisir (et un challenge) de s'attaquer aux problèmes posés par Éric Angelini. Cette fois, c'est .

La fonction "carré" donne effectivement lieu à des nombres gigantesques: en partant de 499, on arrive rapidement à 

499 [249001] 2491 [6205081] 62581 [3916381561] 985 [970225] 9705 94187025 [8871195678350625] qui se réduit à 9302


Une racine de 2 livre 65 termes avant de se mettre à boucler; il est probable que des séquences plus longues existent, mais à quoi bon s'acharner quand on rencontre un nombre qui se trouve déjà dans une boucle précédente


2 4 16 256 [65536] 3 9 81 [6561] 51 2601 [6765201] 75201 [5655190401] 694 [481636] 4813 [23164969] 2314 [5354596] 3496 [12222016] 6 36 1296 [1679616] 79 6241 [38950081] 3951 [15610401] 564 318096 [101185065216] 82 6724 [45212176] 4576 [20939776] 2036 [4145296] 15296 [233967616] 2971 [8826841] 2641 [6974881] 69741 [4863807081] 46371 [2150269641] 5094 [25948836] 259436 [67307038096] 89 7921 [62742241] 671 [450241] 5021 [25210441] 50 [2500] 25 625 390625 [152587890625] 17906 [320624836] 48 2304 5308416 [28179280429056] 17456 [304711936] 4796 [23001616] 23 529 279841 [78310985281] 730952 [534290826304] 5986 [35832196] 582196 [338952182416] 9546 [91126116] 92 [8464] 86 7396 [54700816] 547816 [300102369856] 12985 [168610225] 805 648025 [419936400625] 1325 [1755625] 1762 [3104644] 3106 [9647236] 94723 [8972446729] #86#


Pour (n+1)*a(n), en partant de 7 (et quelques autres), la série s'effondre au septante-septième terme; il faut grimper à 19128 pour en obtenir septante-huit, et rien de mieux jusqu'à 10 000 000


Une séquence pseudo-fibonaccienne (premier terme 1) donne nonante-huit termes au départ de 1 80
Même là, pas moyen d'atteindre les cent ☺

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Merci Éric !
L'autre ami c'est donc Jacques-Georges T.-B. qui nous envoie un « ça balbutie » en nous proposant une illu de son travail in progress : trop bon !
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23 octobre 2018 -- 22:40

Ah, ces deux courriers m'ont sauvé la journée !
Quelques nouvelles de Man – le tournoi d'échecs – avec les appariements pour la ronde 5 :



Et on termine comme on a ouvert – par Liliana Porter (ça rime) :









Bonne nuit à tous :





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